Édition pour les Romands

Cobra rechargée : Bruyante. Légère. Impitoyable.

 

L’AC Cobra est de retour – et elle a du caractère. Pas une résurrection nostalgique, pas une réinterprétation rétro édulcorée, mais une déclaration sur quatre roues. Ceux qui crient instinctivement « Shelby » révèlent surtout une chose : un déficit aigu de mémoire historique. Car si son allure évoque les interprétations musclées de la légèreté britannique par Carroll Shelby, la nouvelle Cobra n’est pas une copie – c’est un caractère propre. Sans bénédiction texane, mais avec des racines britanniques et une finition internationale.

 

AC Cars, l’une des plus anciennes marques du Royaume-Uni, ne revient pas sur scène avec des étoiles dans les yeux, mais avec un regard déterminé. Et pas n’importe où : à Miami, là où le style prime généralement sur la substance. Et c’est justement dans ce paradis pastel que le nouveau Cobra GT Roadster s’impose comme une gifle mécanique à la fade standardisation des performances. Pas un gadget lifestyle, mais une vraie supercar – qui n’a pas besoin du label Shelby pour montrer qui commande.

 

Construite non pas dans les anciens ateliers de Thames Ditton, mais en Suède high-tech. Cela ressemble à une crise d’identité ? C’est en réalité une fusion astucieuse d’héritage britannique, de précision scandinave et de puissance financière chinoise. T-Engineering, issue de l’ADN Saab, assure la production – et le résultat n’a rien d’un patchwork exotique. C’est plutôt la preuve que la mondialisation peut parfois donner naissance à de vrais produits.

 

Sous le capot ? Aucun compromis électrique, aucun plug-in en quête de rédemption – mais un bon gros V8. Le 5,0 litres Coyote, bien connu des amateurs de Mustang GT, est plus qu’un moteur : c’est une menace pour ceux qui confondent performance et silence. Entre 454 et 663 chevaux, selon votre degré de folie. Boîte manuelle à six rapports signée Tremec ou boîte auto Ford à dix vitesses au choix. Si vous ne transpirez pas, c’est que vous êtes sourd… ou déjà mort.

 

Les proportions ? Allongées, élargies, aiguisées. Empattement rallongé de 28 cm, dix centimètres de plus en longueur, voie élargie. La nouvelle Cobra ne cherche plus à plaire – elle veut dominer. Carrosserie en carbone, poids à vide maîtrisé autour de 1 450 kg. Pas une vue nostalgique dans le rétro, mais une offensive bien ancrée dans l’avenir. Silhouette fidèle au classique, mais posture revue : plus Predator, moins Playboy.

 

Et pourtant, l’éléphant est toujours dans la pièce : le traumatisme Shelby. Carroll Shelby a un jour transformé un roadster britannique en symbole de puissance américaine. C’était grand. C’était important. Mais c’était hier. Aujourd’hui, Shelby a autant à voir avec cette voiture qu’Elvis avec Spotify. Coller l’étiquette Shelby sur la nouvelle Cobra ? C’est non seulement un abus de langage, mais une expropriation culturelle. Le nom appartient à Shelby. La voiture, à AC.

 

Reste la question du prix – et elle est musclée. Environ 240 000 dollars pour le roadster, 275 000 pour le coupé. Une somme qui poussera certains à chercher l’autocollant Shelby pour se rassurer. Mais c’est précisément là que tout se joue : cette voiture n’a pas besoin de reliques pour briller. Elle se suffit à elle-même. Et elle s’en sort très bien.

 

L’AC Cobra est de retour. Bruyante, légère, sans compromis. Pas un revival de salon, mais une vraie bête de scène. L’appeler Shelby ? C’est n’avoir rien compris – et ne pas la mériter.

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